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21 décembre 2020: journalisme et devoir de vérité

21 décembre 2020: journalisme et devoir de vérité

Soutenance de la thèse d'Alessia Smaniotto (LIER-FYT) intitulée "Les faits, les news et l'opinion publique. Robert Ezra Park et l’enjeu démocratique du journalisme moderne".

Lundi 21 décembre 2020 - 14h-18h - En distanciel.

 

 

Pour assister, contacter Alessia Smaniotto: alessia.smaniotto@hotmail.it

Membres du jury: Bruno Karsenti (LIER-FYT, directeur de la thèse) - Géraldine Muhlmann (Université Paris 2) - Maria Chiara Pievatolo (Université de Pise) - Sylvain Piron (EHESS).

Résumé: Pour le journaliste et sociologue américain Robert Ezra Park (1864-1944), les “news” sont une forme de connaissance. À partir de l’étude approfondie de ses textes portant sur la pratique journalistique, cette thèse contribue à la compréhension du rapport particulier qui unit la pratique journalistique et un certain “devoir de vérité” qui se développe dans les sociétés modernes et dans un cadre démocratique. Grâce à cette analyse il est possible d’avancer que c’est parce qu’un certain idéal de la vie politique commune surgit que le journalisme moderne tente, à un moment donné, de se fonder sur une idée empirique de vérité en suivant le mouvement qui a caractérisé les sciences modernes. Cette thèse vient compléter la connaissance de l’œuvre de R. E. Park, analysée jusqu’aujourd’hui principalement à partir des thèmes parkiens du comportement collectif et de la sociologie urbaine. Elle contribue au domaine d’études des Journalism Studies à partir d’une approche de philosophie des sciences sociales. La notion de “news” sert de fil conducteur et fait l’unité du corpus étudié, permettant de proposer une description de la pratique journalistique qui rende compte de la place qu’a prise en démocratie l’activité journalistique en général, indépendamment des formats et des médias de diffusion. R. E. Park identifie les racines et la portée sociale et politique de la pratique journalistique précisément dans cette opération cognitive et sociale que constitue la production de “news”. Le journalisme n’est pas alors, seulement, une action de médiation qui diffuse un savoir produit par ailleurs. À travers les “news”, qui est sa forme de connaissance propre, il opère une transformation des faits et des opinions en une connaissance qui fait agir. Cette lecture de R. E. Park permet de faire ressortir plus précisément ce qui relie, dans la modernité, la pratique du journalisme à la question de la vérité et à celle de l’idéal démocratique : en mettant en lumière d’une part le lien entre journalisme et sciences modernes, d’autre part une visée collective d’un savoir sur le social. Le journalisme alors, qui pratique l’enquête et considère les faits comme la base incontournable des discussions, en les ancrant dans un réel partagé, n’est pas indépendant du mouvement des sciences modernes. Il est solidaire des sciences modernes et concurrence les sciences sociales, en particulier l’histoire et la sociologie, dans une entreprise collective de connaissance sur le social. De la lecture des textes de Park ressort une nouvelle compréhension du journalisme qui permet aussi de reconsidérer certaines des catégories de la politique moderne – comme celle d’opinion publique ou de démocratie. Renversant les perspectives plus courantes, il ne s’agit pas dans cette thèse d’évaluer ou de juger la pratique journalistique à l’aune d’une idée de démocratie donnée, mais plutôt de réinterroger les pratiques démocratiques à partir de l’émergence du journalisme en tant qu’opérateur de connaissance. Par là, enfin, cette thèse amorce une réflexion sur le rapport qui relie historiquement journalisme et sciences sociales, dans la perspective d’un renforcement mutuel de ces deux formes de connaissance.
 

Rubriques à consulter

EHESS
CNRS

 

Motion du LIER-FYT concernant le projet de loi sur les retraites et la LPPR

 

Les membres statutaires et les représentantes des doctorant·e·s du Laboratoire interdisciplinaire d’études sur les réflexivités – Fonds Yan Thomas (LIER-FYT, EHESS-CNRS, FRE 2024), réuni·e·s en Assemblée générale le 21 janvier 2020, et ses doctorant·e·s, réuni·e·s (via un vote électronique les 22 et 23 janvier 2020), déclarent leur opposition au projet de loi sur les retraites, aux orientations qui prévalent dans la préparation du projet de loi de programmation pluriannuelle de la recherche (LPPR) et aux décrets d’application de la loi de transformation de la fonction publique.

Ces prétendues réformes qui poussent plus loin encore le démantèlement de l’État social, la dislocation du service public et la mise au pas de l’enseignement supérieur et de la recherche, qui plongent un peu plus les jeunes dans la précarité, aggravent les inégalités de statut et de condition et vouent un plus grand nombre d’ancien·ne·s à vivre dans le besoin, nous touchent, nous qui pratiquons les sciences sociales, à un point névralgique. Car les institutions de l’État social et du service public et les sciences sociales sont inextricablement liées : elles résultent d’une même transformation historique qui, à travers des crises et des luttes sociales, a conduit dans nos sociétés à toujours davantage d’intégration et de solidarité. La protection sociale et l’existence d’un secteur public ont progressivement exprimé et réalisé cette tendance sur le plan de l’organisation sociale, tandis que les sciences sociales contribuent à en renforcer les effets dans la conscience collective en même temps qu’elles en mesurent les limites et aident à les surmonter. Cette transformation est loin d’être achevée. Elle se heurte, avec notamment la crise écologique, à des défis considérables qui rendent les sciences sociales plus nécessaires que jamais. Inscrire les réformes en cours dans l’histoire longue de nos sociétés les révèle ainsi dans ce qu’elles sont : des régressions. Dans l’immédiat, il est indispensable que nous y opposions notre refus. Mais au-delà de cette mobilisation nécessaire, nous affirmons notre détermination à continuer notre métier, celui des sciences sociales, dans le cadre du service public d’enseignement supérieur et de recherche. Nous refusons de voir notre fonction sociale réduite aux exigences d’une ingénierie gestionnaire destinée à asservir la vie sociale aux logiques de marché plutôt que d’y favoriser l’épanouissement du bien commun.

Pour ces raisons,

1) Nous appelons chacun·e à soutenir les mobilisations contre la réforme des retraites et contre la transformation de la fonction publique et de l’enseignement supérieur et de la recherche, à participer aux assemblées générales et aux journées d’action interprofessionnelle et à faire preuve de solidarité, notamment en contribuant aux caisses de grève, avec les secteurs professionnels qui portent actuellement l’essentiel de l’effort de mobilisation.

2) Nous demandons aux institutions d’enseignement supérieur dans lesquelles nous exerçons de mettre en place des règles claires qui permettent aux étudiant·e·s de s’engager, sans être pénalisé·e·s, dans le mouvement qui a pour enjeu leur avenir. (Ces règles doivent, à notre sens, prendre la forme d’un réaménagement des modalités et des temps d’enseignement et d’apprentissage plutôt que de procédures de validation automatique des compétences et savoirs acquis.

3) Nous réclamons que le gouvernement sursoie au projet de la loi de programmation pluriannuelle de la recherche et organise une concertation digne de ce nom, afin de définir collectivement les conditions d’une véritable refondation de l’enseignement supérieur et de la recherche et d’en déterminer le calendrier et les moyens, dans le respect des qualifications et des vocations de ceux qui y consacrent toute leur énergie et en tenant compte de la diversité des besoins sociaux en matière d’enseignement supérieur et de recherche. Nous mandatons la direction de notre unité à signer l’« Appel à signature des Directions de laboratoire de recherche pour un moratoire sur la LPPR et pour la tenue d’États généraux de la Recherche et de l’Enseignement supérieur » (voir ici).

Motion adoptée par l’Assemblée générale du LIER-FYT le 21 janvier 2020 par 20 votes favorables et 2 abstentions, et par l’Assemblée générale des doctorant·e·s du LIER-FYT (via un vote électronique) le 22 et 23 janvier 2020 par 32 votes favorables (aucune abstention, ni vote défavorable).


 

LIER-FYT
Laboratoire interdisciplinaire
d'études sur les réflexivités - Fonds Yan Thomas
Directeur: Cyril Lemieux
Directrice adjointe : Julia Christ
A629 - 54 Boulevard Raspail 75006 Paris

Tel : 33 (0) 1 49 54 20 61
Prtncipaux contacts : voir ici

 

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lier-fyt_info-request[at]ehess.fr